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À la mort... à la vie.

Plusieurs jours sans internet... que c'est doux de s'éloigner du tumulte des ondes de mon ordinateur. Jeter un coup d'œil de temps à autre à ma boite mail, et la refermer tout aussi rapidement, en espérant que ce n'était cette fois là (encore) pas trop important.

Mes déclarations se sont faites elles aussi plus silencieuses, plus discrètes, toutes en délicatesse. Dans un regard, dans une étreinte, dans un détail vestimentaire. Par des vibrations musicales, vocales, ou amicales. Par un sourire heureux, un sourire fatigué, un sourire amusé. Tout ce qui fait que le temps ne s'arrête pas, et que l'amour, avec la vie, continue de nous traverser pendant les temps de repli et de travail en profondeur.

J'ai bien écrit quelques petites choses sur des coins de carnets. D'autres se sont déposées dans mon esprit, et en sont déjà reparties pour irriguer d'autres visages. Au cours de cette semaine, je n'ai écrit qu'une seule déclaration d'amour formelle et officielle...

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À la mort, qui est partout où est l'amour, où est la vie, puisqu'elle lui offre cette obscurité belle et profonde sans laquelle je ne pourrais briller si fort. Puisqu'elle enveloppe toute clarté de sa rondeur calme et rassurante. Puisqu'elle est le temps du repos, le temps d'un souffle qu'on expire, ou d'un morceau de soi qu'on accepte de laisser, partir, ailleurs, aller transformer d'autres êtres et d'autres vies.

J'aime la mort qui est jouissance ultime lorsque l'on fait l'amour, la mort qui fait l'intimité à soi, à l'autre : vulnérabilité qui touche une fois dénudée de ses carapaces illusoires.

J'aime la mort quotidienne en moi des pensées ou des affects trop encombrants : elle me déleste gracieusement de tant d'expériences fleuries (jadis) - déjà fanées lorsque je tente de les coller à une identité figée. J'apprends à ne plus avoir peur de la mort qui est douce aussi quand reliée à la vie, à laquelle elle s'efforce continuellement de faire un peu de place.

Apprendre à aimer la mort, à mourir un peu chaque jour, c'est d'abord la comprendre, et puis la reconnaître, apprendre à apprécier sa terrible nécessité. La mort. L'amor. L'amour au coin des lèvres dans un dernier soupir. N'ayons pas plus peur de la mort que de l'amour. Et inversement!

J'aime la mort comme début de cycle. Car toute mort préfigure une renaissance, en puissance, d'un être et d'une forme encore inconnus. La mort marque le début du cycle menstruel, et rien de monstrueux dans cette libération de liquides et de sang permettant à un nouveau nid d'advenir. D'ailleurs, c'est la vie qui mord, qui mange, pas la mort! La mort dort, s’écoule paisiblement, et quand de tous côtés nous nous affairons en soufflant de fatigue puis de détresse en feignant l'ignorer, elle nous regarde faire et son sourire nous dit : "je suis là, ne t'inquiète pas, depuis toujours à tes côtés, laisse moi donc un peu de tes poids, que je les porte...".

De son rejet naît la souffrance, car il suffit de la prendre un instant dans nos bras et de lui partager un peu de nos peurs pour nous sentir à nouveau tout léger et lumineux. Elle les reçoit avec joie nos peurs qui nous pèsent et que nous ne voulons pas voir ! Elle aime tout le monde la mort, et tout ce qui existe : idées, pensées, objets, croyances, corps... Elle accepte tout, et de tous, sans jamais rejeter personne, sans jamais perdre confiance en ses capacités, en sa nécessité. Elle accueille, elle absorbe, elle apaise. Jamais fortuite, car elle prévient, toujours, avant de proposer son aide. Il y a dans la mort plus d'amour qu'en beaucoup d'entre nous. La mort cohabite avec l'amour, elle sait établir le dialogue, le respecter tout en se respectant. L'amour ne triomphera pas. La mort non plus. Ont-ils jamais été en guerre ? On ne triomphe pas de ses amis. On les écoute, et avec eux, main dans la main, on construit. Quoi ? L'amor.

Je voudrais tant refaire de la Mort une déesse, et de la mort une fête, une célébration! Faisons donc danser nos squelettes en son honneur, expirons longuement pour goûter au calme de son rythme en écoutant dans le silence son doux chant amical.

Je profite, depuis lors, des instants de mort comme des instants de vie, prenant pleinement conscience de ma place dans cette ronde entraînante qui nous anime, cyclique et éternellement renouvelée.

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